Nous pouvons avancer sans se tromper qu’aujourd’hui, aucunes leçons n’ont été retenues de la crise financière de 2008. La bourgeoisie et les grands patrons font toujours plus de profits, le fonctionnement des marchés financiers continue à se complexifier et la machine est complètement hors de contrôle.
Dans le même temps jamais nous n’avons enregistré autant de reculs sociaux, les cures d’austérité (pour nous) continuent, les services publics sont démantelés, les riches récoltent toujours plus de cadeaux fiscaux et les entreprises sont gavées d’argent public qu’elles s’empressent de reverser en dividendes à leurs actionnaires.
L’extrême-droite n’est pas en reste et prend ses quartiers en France. Elle étend sa sphère d’influence largement aidée par cette même bourgeoisie. Toutes les grandes métropoles françaises ont droit à leur bande de fascistes qui agressent bien souvent dans la plus grande décontraction.
L’Europe ferme ses frontières, des guerres éclatent et avec elles leur lot de réfugié-e-s. L’Union Européenne préfère donner des millions à l’autocrate Erdogan pour contenir les millions de réfugié-e-s économiques, politiques qui aspirent à un avenir plus radieux.
La France malgré tout vend toujours plus d’armes et à n’importe qui. On arme la dictature égyptienne, on signe des contrats de milliards avec l’Arabie Saoudite, le complexe militaro-industriel bat son plein et les vendeurs de mort s’en mettent plein les poches.
A l’intérieur de nos frontières, la violence d’Etat continue de s’exercer dans les quartiers populaires, légitimée par le racisme d’Etat et dans le but de raffermir le contrôle de l’ennemi intérieur.
Ce sont désormais les acteurs du mouvement social qui font les frais des pratiques qui existent depuis des années sur les habitant-e-s des quartiers populaires.
Il est plus que jamais nécessaire de rappeler la nécessité pour les dominé-e-s de s’organiser entre eux et elles afin de promouvoir leur autonomie politique, notre autonomie politique et de s’entrainer, de se mobiliser pour l’autodéfense populaire.
Crise économique, crise sociale, tentation du fascisme
En Pologne, en Hongrie, en Turquie, les forces réactionnaires sont déjà au pouvoir, dans le reste de l’Europe de nombreux mouvements fascistes attaquent et conspirent pour une révolution sociale-nationaliste.
En France, l’extrême-droite joue son rôle de supplétif de la bourgeoisie, attaque les minorité-e-s qu’elles soient de race, de genre, de religion ou bien d’orientation sexuelle. Elle promeut un discours social sur fond de suprématie blanche. Elle effectue des raides dans les manifestations et plus récemment attaque des étudiant-e-s dans les universités et les lycées.
Ce cocktail qu’a déjà connu l’Europe semble se répéter.
A chaque crise de la social-démocratie, les forces de l’extrême-droite sont appelées à la rescousse. La bourgeoisie lorsqu’elle est acculée, fait appel aux fascistes quitte à laisser ce pouvoir lui échapper. L’important étant que ces derniers ne nuisent pas trop à leurs profits.
Crise écologique
Toutes nos considérations d’ordre sociale risquent d’être balayées par une crise écologique de grande ampleur. Les prévisions les plus pessimistes prévoient un effondrement de notre société « thermo-industrielle » en 2020.
En Novembre 2017, 15 364 scientifiques de 184 pays déclaraient : « Nous mettons en péril notre avenir […]il sera bientôt trop tard pour dévier de notre trajectoire vouée à l’échec » dans la revue Bioscience.
D’ici peu de temps nous vivrons de nouvelles extinctions massives d’espèces animales, l’eau est de plus en plus rare, polluée et nous subissons déjà une augmentation permanente de la température terrestre qui conduira à des grandes catastrophes.
Nous sommes de plus en plus nombreux-euses sur Terre et faisons déjà face à l’épuisement des ressources comme le sable, le pétrole, les métaux rares et les forêts.
Les accidents nucléaires se multiplient et les pays déjà dotés de l’arme nucléaire augmentent leur nombre d’ogives.
Toutes ces crises successives sont soumises à une fuite en avant des gouvernements mondiaux. Leur cynisme les pousse non pas à éviter cette catastrophe écologique mais plutôt à réfléchir et s’organiser comment ils gèreront les conséquences de celle-ci.
Les cop 21 et autres grenelles de l’environnement sont de la poudre aux yeux jetée par les gouvernements afin d’apaiser leurs populations.
Il n’est pas compliqué d’y voir un lien avec le recul de nos libertés fondamentales : fichages généralisés, état d’urgence permanent, course à l’armement, et surtout toujours plus de répression. Ces reculs des libertés se faisant bien-sûr au nom de la défense de la nation contre le terrorisme.
Quoiqu’il en soit nous pouvons légitimement penser que ces reculs sont prévus pour fliquer les mouvements sociaux grandissants.
C’est à l’image de ce que fût le prélèvement ADN : au départ il a été justifié afin de ficher les délinquants sexuels, il est désormais systématiquement demandé aux militant-e-s.
L’appel à l’aide aux autorités
Le mouvement social généralement prône un pacifisme naïf : « on est contre la violence, on ne veut pas de débordement, on a l’autorisation de la préfecture, voire même : on va faire un SO pour encadrer les manifestants et les comportements qui nous plaisent pas ».
Bien trop souvent, et spontanément, le citoyen lambda se retourne vers l’Etat, censé protéger la veuve et l’orphelin dans le roman étatique.
Dans le cadre de la lutte antifasciste, on réclame des moyens de police pour contrôler les agissements de l’extrême-droite, on demande aux mairies de faire fermer des locaux fascistes.
Quelle preuve de notre impuissance ! Quelle lâcheté !
Certains dénoncent à juste titre le racisme d’Etat, la répression sociale, les discriminations, les violences policières, la justice de classe, la perpétuation de l’ordre patriarcal, le renvoie à la frontière des migrant-e-s, l’emprisonnement.
Mais ce sont bien ces mêmes institutions qui exécutent ces tâches !
Cette politique en plus d’être méprisable, entretien dans l’esprit des gens l’illusion d’un Etat qui serait protecteur, d’un Etat neutre, d’un Etat qui serai l’arbitre en somme des antagonismes sociaux, que la police serait effectivement là pour nous protéger contre on ne sait qui.
Or, l’Etat et sa police ne sont que des outils des dominants, de l’oligarchie économique afin de réprimer, de maintenir son oppression sur les dominé-e-s : la classe ouvrière, les minorité-e-s raciales, religieuses, de genre ou d’orientation sexuelle.
Et surtout si l’Etat se sent en danger il n’hésitera pas à annihiler ce semblant de libertés démocratiques que nous octroi la démocratie bourgeoise. C’est bien d’ailleurs ce qui se passe comme nous l’avons dit plus haut, sur fond de guerre au terrorisme avec le passage de l’état d’urgence dans la législation.
La peur du terrorisme est un outil qui permet à l’Etat de rogner chaque jour un peu plus sur nos libertés individuelles.
Et si la suppression de nos libertés ne suffit pas, elle appellera l’extrême-droite en renfort soit par les urnes en préparant l’opinion publique (avec l’introduction comme on le voit actuellement de tous les thèmes de campagne du feu Front National et de groupes comme Génération identitaire dans le débat public), ou soit par la force.
Et ne nous trompons pas, les premières balles et mesures contre-révolutionnaires seront pour notre camp.
Autonomie politique, Autodéfense populaire et auto-organisation des opprimé-e-s
Il faut dès aujourd’hui se préparer au durcissement de la lutte révolutionnaire.
Face à l’Etat, aux flics, aux patrons, aux fachos, organisons l’autodéfense populaire, ne comptons que sur nous !
Apprenons à nous battre, à nous faire confiance, ne soyons plus jamais démuni-e-s.
Le camp de l’Etat est prêt, il s’est déjà doté de tout ce qu’il pouvait pour nous réprimer.
Les fascistes s’organisent, s’arment et s’entrainent (certes de manière bien souvent ridicule) et adorent la violence, elle est leur moyen et leur finalité pour imposer un régime totalitaire.
Il est plus que jamais important malgré tout de les prendre au sérieux. Ils appellent même sur des sites politiques publiques à s’armer militairement!
Le mouvement révolutionnaire doit se préparer à ces grands changements.
Le privilège dont nous jouissons de vivre en paix ne doit pas nous faire végéter. Ce privilège d’ailleurs, ce sont d’autres dominé-e-s qui le payent. Nous ne vivons en paix à l’intérieur des frontières de la métropole car la France fait la guerre en notre nom dans les quatre coins du monde.
C’est le résultat de la politique impérialiste et néo-colonialiste de la France qui vise à asservir bon nombre de pays et de populations au nom des intérêts des capitalistes français. Les attaques terroristes sur le territoire métropolitain sont bien souvent des réponses militaires à cette politique. Le luxe de faire la guerre et de tuer hors de nos frontières se paye lui aussi.
Une révolution est et ne sera possible que en imposant une plus grande violence encore que nos concurrents.
Mais pas n’importe-quelle violence. Une violence de vie, collective, massive, qui entrainera la paix, l’égalité sociale et économique.
Elle entrainera l’arrêt de la surexploitation de la planète, la libre circulation et installation de chacun-e-s, la liberté de nos choix de vie, de nos orientations sexuelles…
La révolution devra mettre fin au patriarcat, à la déconstruction de nos privilèges, de nos attitudes oppressives.
Nous détestons la violence, nous détestons les rapports de domination, mais c’est bien l’oppresseur qui choisit le degré de violence pour assoir son pouvoir.
Nous devons affirmer nos choix de vies, construire, à réinventer nos rapports comme cela se passe parfois sur les zads.
Nous devrons abolir la justice de classe/race/genre et repenser nos règles du jeu.
L’autonomie politique est un appel à ne plus dépendre de personne si ce n’est de nous-même, d’être les acteurs-trices de notre propre émancipation.
Ce texte n’est pas une ode au virilisme, attention, la révolution ne se passera pas de la déconstruction de nos rapports sociaux, la violence révolutionnaire doit être collective.
A l’heure où nous écrivons ce texte, il est temps pour le mouvement révolutionnaire de se préparer, de se donner des armes pour nos luttes car de grands bouleversements arriveront.
Ce rapport de force ne pourra se construire que dans l’unité des forces révolutionnaires.
Nous le répétons : nous n’avons pas besoin de leaders, de chefs, d’organisations avec à leurs têtes des individus qui finiront par se battre pour leurs places, leurs postes et non pour nos intérêts.
Nous n’avons pas besoin de ceux et celles qui « se posent en tampons entre le pouvoir et ses opposants, en amortis des colères, en modérateurs des révoltes, appelant inlassablement au calme et à la discipline, et condamnant perpétuellement les casseurs, zadistes, saboteurs, faucheurs, squatteurs, tagueurs, émeutiers, anarchistes et autres révolutionnaires. » comme l’écrit notre camarade Yannis Yolountas.
En cela ne nous laissons pas berner par les élections bourgeoises qui ne sont que des prétextes à l’illusion démocratique.
Nous devons nous donner les moyens de nous défendre et ce n’est pas la police qui viendra à votre secours. Elle ne vient déjà plus dans les quartiers populaires pour autre chose que réprimer.
Il sera même beaucoup plus probable que la police vienne vous chercher pour vous enfermer.
C’est ce qui se passe déjà pour nous, pour les révolutionnaires, pour les syndicalistes en lutte, pour tous ceux et celles qui font les choix d’une autre vie.
Le mouvement révolutionnaire doit s’unir dans les luttes et non derrière ses drapeaux identitaires.
Nous devons déborder le pouvoir et les cadres d’organisation qui nous maintiennent dans le pacifisme social.
Enfin, nous avons, aujourd’hui plus que jamais besoin de s’unir mais aussi de se soutenir !
La solidarité est le moteur de nos luttes, continuons à nous rassembler à chaque appel à mobilisation que cela soit pour éviter les expulsions de squat, à empêcher l’arrestation de personnes sans-papiers, à soutenir les initiatives comme la réquisition de logement, à soutenir nos proches qui passent en procès, à envoyer des mandats etc… etc..
Cette solidarité est notre arme !
Pour aller plus loin :
Articles :
https://www.mediapart.fr/journal/france/090418/forces-de-l-ordre-liees-l-ultra-droite-violente-la-dgsi-s-inquiete
https://www.mediapart.fr/journal/culture-idees/011116/francois-burgat-la-violence-dite-islamique-ne-vient-pas-de-l-islam?onglet=full
https://www.letemps.ch/sciences/jamaisvu-15-000-scientifiques-sunissent-face-degradation-planete
http://blogyy.net/2018/04/09/non-violence-ou-violence-dans-la-lutte-2/
Livres :
Pablo Servigne : Comment tout peut s’effondrer. Petit manuel de collapsologie à l’usage des générations présentes. Editions du Seuil. Collection Anthropocène. 2015
Mathieu Rigouste : L’ennemi intérieur. La généalogie coloniale et militaire de l’ordre sécuritaire dans la France contemporaine. Edition La Découverte. 2009
Mathieu Rigouste : La domination policière. Edition La Fabrique. 2012
Vidéo :
Documentaire : Fascism Inc. Réalisé par Aris Chatzistefanou (2014)